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jeudi 27 juin 2024

Le Congo de 1885 à 1960, et après ?


Trois phases ont marqué l’histoire de la République Démocratique, à son travers son long et tumultueux fleuve. Elles ont successivement trait l’État libre du Congo, au Congo belge, ainsi à la période postcoloniale couvrant, la présence belge sur le sol congolais ayant duré 75 années.

L’État indépendant du Congo

L’accession au trône de Belgique en 1864 par le duc de Brabant a été considérée par Lord George Clarendon comme une nouvelle consécration de l’œuvre de 1830 et la plus forte garantie du maintien de la paix en Europe. Bien avant cet événement, Léopold II s’était intéressé à l’idée de colonisation. Le système économique mis en place par les Hollandais dans la partie occidentale de Java l’a beaucoup impressionné lors d’un voyage en 1865 en Indonésie. Par conséquent, grâce aux expéditions du journaliste et explorateur, le monarque belge a délimité un immense territoire au centre de l’Afrique et réussi à le faire reconnaître comme État indépendant du Congo (EIC) en 1885 à la Conférence de Berlin. Il l’a ensuite administré de manière privée. Les atrocités commises sur les populations locales en vue d’un rendement maximal des ressources naturelles ont suscité l’indignation et la mise sur pied en 1904 d’une commission d’enquête internationale. En 1908, mettant fin aux 23 années de gestion léopoldienne, le Parlement de Belgique a voté l’annexion de l’État indépendant du Congo.

Le Congo belge et le système colonial

En 1908 le roi du Congo, reconnu comme tel par la Chambre des représentants en avril 1885, a donc légué son immense concession à l’État belge. L’appellation de Congo belge et ses frontières définitives n’ont été fixées qu’à la fin des années 1920 – par les accords de Bruxelles de 1927, complétés par trois protocoles. Ceux-ci ont été successivement signés en 1929,1930 et 1934. L’article 2 de la Charte Coloniale de 1908 ayant prescrit la non-contrainte de travailler au profit des sociétés ou des particuliers au Congo, l’État colonial belge a fait en sorte d’effacer l’image tyrannique de la gestion léopoldienne sans pour autant en changer le fonctionnement proprement dit.

Selon les experts, l’État indépendant du Congo a instauré une économie criminelle sur la base de la violence et le Congo belge n’a pas fait beaucoup mieux. Cela s’est articulé de diverses manières : usurpation des terres et travail forcé, limitation des droits et libertés sur le plan du travail, mise sur le marché des matières premières et système d’exportation au profit des grandes entreprises, pression permanente sur la population en application du principe de l’autofinancement de la colonie. Dans les deux cas de figure, il s’est agi d’une politique de prédation. Outre des améliorations après la Seconde Guerre mondiale relatives au développement des structures sociales et des soins de santé, à l’amélioration des conditions de travail et à l’instruction, ces progrès à l’image d’une « colonie modèle » reposaient sur l’oppression et un système racial. De plus, l’exploitation des richesses ayant soutenu la violence et la coercition comme élément fondamental de la domination coloniale, la nature de l’économie a été caractérisée par un enchevêtrement entre l’État et le capital, le public et le privé, au profit des grandes entreprises. En grande partie, à propos de l’État colonial belge, l’empreinte laissée par le mode de gouvernement a concerné une main-d’œuvre presque « gratuite » et le recours aux mesures contraignantes.

Les conséquences de la colonisation

53 ans plus tard, sans faire abstraction de la responsabilité des acteurs congolais, le système structurel de la colonisation belge aurait des conséquences importantes pendant la période postcoloniale. On assisterait à un effondrement de la production agricole au cours des premières années de l’indépendance du Congo, soit au moins 40 %, et à une dégradation des réseaux routiers de façon catastrophique. Quant à l’organisation de la propriété foncière, de la même façon que les intérêts des paysans indépendants ont été subordonnés aux planteurs européens, les élites congolaises postcoloniales reprendraient les anciennes concessions des Européens et perpétueraient l’appauvrissement. La perte de terres et l’exploitation des travailleurs pérenniseraient une classe sans cesse plus nombreuse d’agriculteurs sans terre.

Une seconde indépendance ?

À quelques jours du 64ème anniversaire de l’indépendance de l’ancien Congo belge, devrait se poser en principe la question du destin des populations congolaises. De 1960 à 2024, après divers régimes gouvernementaux, faudrait-il attendre encore 11 années de plus de quadrature spirituelle du cercle, soit l’année 2035, pour que le Congo de Kasa Vubu et de Lumumba, ainsi que de Kimbangu, accède à une seconde indépendance ? Un sursaut républicain s’enclencherait-il finalement en vue d’un processus salutaire sur la base du renouveau, du courage et de la suite dans les idées ?

Gaspard-Hubert B. Lonsi Koko